Paris 8 et 9 Mai /71
Monsieur A. Grünberg, Munich
Je vous confirme, Monsieur, ma lettre des 6 et 7 Ct.
Nous touchons, je crois, au dernier épisode de cette lutte fratricide. La redoute de Montretout armée de 82 pièces de 24 et de 48 a été démasquée ce matin et on annonce pour ce soir, huit heures, le commencement du bombardement du Point-du-Jour, qui doit précéder l’assaut de quelques heures. La dernière sommation du Gouvernement de Versailles aux Parisiens, parue hier dans les journaux du soir, annonçant que les Ponts-Levi seront canonnés s’ils sont levés, est de nature à faire penser que la grande action est proche, et le mouvement exceptionnel des Bataillons Fédérés qui se sont succédés, presque toute la journée, sur la Place de la Concorde, pour être passés en revue par le délégué à la guerre le citoyen Rossel, ne laissent plus de doute sur une attaque sérieuse de l’enceinte. Une grande animation règne surtout dans nos quartiers, je vais faire filer ma femme et mon fils rue Richelieu, je ne crois pas qu’il soit possible de reposer, rue Royale, la nuit prochaine.
Je n’ai pas encore reçu les réponses à mes lettres sur différentes questions intéressantes que je vous ai notées. Ce n’est qu’un retard, je l’espère, je ne puis m’expliquer, autrement, votre silence.
Recevez, Monsieur, je vous prie, l’expression de mes sentiments dévoués.
