Nouvelles de Paris

Une collection de lettres de 1870-1871 envoyées depuis Paris au cours du siège par les Prussiens, puis de la Commune.

Personnes impliquées dans les lettres Notes techniques liées à la transcription
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Paris 3 Avril /71

Monsieur A. Grünberg, Munich

Je vous confirme, Monsieur, ma lettre du 2 Ct.

Nous avons été réveillés jusqu’à 3 heures du matin par des bataillons de Gardes-Nationaux fédérés se dirigeant par les Champs Elysées à Neuilly. Sans le moindre respect pour le sommeil des Parisiens, les bataillons se succédaient à de très petits intervalles, tambours battant ou trompettes sonnant, joignez à cela des cris et des chants et vous aurez une faible idée du tapage infernal qui nous a tenus éveillés.

Au point du jour, tous ces bataillons se sont mis en mouvement pour sortir de Paris et se diriger sur Versailles, et dans l’intime persuasion que le Fort du Mont-Valérien avait été livré pendant la nuit, par les troupes de Versailles, aux généraux de l’hôtel de ville, il y allaient de confiance, quand tout à coup une pluie d’obus est venue porter le trouble et le désordre dans leurs rangs. Ils ont opéré leur retraite mais non sans perte. Les deux chevaux attelés à la voiture du Général Bergeret ont été éventrés par un obus sans cependant que le Général ait été atteint. C’est lui qui dirigeait l’action, il y avait environ 25,000 hommes sur ce point. Un autre mouvement protégé par les forts de Vanves et d’Issy s’est opéré par Clamart et le Bas-Meudon, mais il n’a pas été plus heureux, les troupes de Versailles ayant ouvert un feu d’artillerie très vif sur la Terrasse de Meudon. Les résultats de cette première journée, quant au terrain à gagner, sont à peu près nuls, mais on dit qu’elle est très meurtrière. Flourens commandant les Gardes de Belleville a eu, dit-on, un bras emporté.

Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments dévoués.

Louis Guillier