Paris 16 Novembre /70
Monsieur A. Grünberg, Munich
Je vous confirme, Monsieur, ma lettre du 15 Ct.
Un de nos Ballons Poste Le Daguerre est tombé dans les lignes ennemies, il est donc probable que vous éprouverez une interruption dans la réception de mes lettres adressées chaque jour, à moins que ces Messieurs aient un certain respect pour les missives adressées à Munich. Le Gt de la défense vient de décider que les ballons ne s’élèveraient plus que pendant la nuit.
Je vous parlais d’un succès hier, mais les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Les feuilles anglaises annoncent que la ville de Dijon a été occupée par l’ennemi après neuf heures d’une défense héroïque. La Capitale de la Bourgogne est aujourd’hui une ville ouverte, elle avait des remparts qui ont été sacrifiés à des boulevards extérieurs, mais les brâves et vaillants Bourguignons n’ont rien perdu de leur antique réputation. J’ai ressenti un noble orgueil en pensant à mes chers compatriotes, mais un sentiment bien pénible me remplit d’angoisses, j’avais là des parents et des amis…… que sont-ils devenus ? …… et quand aurai-je de nouvelles ? …… ha ! mon cher Monsieur, quelle affreuse chose que la guerre ! ……
J’envoie aujourd’hui une dépêche-Poste à un oncle qui habite Dôle, si elle arrive, j’aurai, peut-être, je ne sais quand, des réponses par monosyllabes à quatre questions que je lui adresse. On n’a pu encore m’assurer si l’ingénieuse idée dont vous entretenait ma lettre du 13 Ct s’applique à l’Etranger, demain je dois être fixé et vous en parlerai.
Veuillez, Monsieur, nous rappeler au souvenir de Madame Grünberg et agréez, je vous prie l’expression de mes sentiments dévoués.
P.S. J’ai vu Monsieur Louis ce matin, il se porte très bien.