Paris 15 Novembre /70
Monsieur A. Grünberg, Munich
Je vous confirme, Monsieur, la lettre du 13 Ct et celle du 14 adressée par ma femme à Madame Grünberg pendant ma garde aux remparts.
La 3me Cie du 1er Bataillon, dont je faits partie, ayant été un peu désorganisée par l’organisation des compagnies de guerre mobilisées, nous étions réduits à 70 hommes seulement, et nous avons subi cinq heures de faction chaque, deux de jour et trois de nuit. Il y a eu presque toute la nuit des engagements entre les avants-poste, dans la direction de Clamart et du bas Meudon, des décharges de mousqueterie se succédaient rapides et bien nourries et les forts du Mont-Valérien et d’Issy se joignant à l’action, on aurait pu croire que l’ennemi tentait une attaque pour s’approcher des remparts. Cependant à quatre heures du matin les feux se sont ralentis, et à cinq heures ils étaient éteints. Revelé de garde à 10 hres nous avons regagné nos foyers passablement éreintés.
Nous venons d’avoir, enfin, un beau succès à Orléans. Cette armée de la Loire, dont on parlait tant, et dont nous doutions toujours, vient de se montrer, elle a chassé les Prussiens d’Orléans, après une lutte de deux jours. Nos pertes, tout en tués qu’en blessés, n’atteignent pas 2,000 hommes ; celles de l’ennemi sont plus considérables. Nous avons fait plus d’un millier de prisonniers et le nombre se sera augmenté par la poursuite. 2 canons modèle prussien, 20 caissons de munitions et une grande quantité de fourgons et voiture d’approvisionnement sont restés entre nos mains. Cette nouvelle est officielle.
Recevez, Monsieur, mes salutations bien empressées.