Nouvelles de Paris

Une collection de lettres de 1870-1871 envoyées depuis Paris au cours du siège par les Prussiens, puis de la Commune.

Personnes impliquées dans les lettres Notes techniques liées à la transcription
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Paris 23 8bre /70

Monsieur A. Grünberg, Munich

Je vous confirme, Monsieur, ma lettre du 22 Ct.

Ayant été commandé de garde, hier soir, pour un service aux remparts, je me voyais privé du plaisir de vous écrire aujourd’hui, et j’avais passé procuration à ma femme, lorsqu’un heureux hasard m’a délivré de ce service pour aujourd’hui. Mon numéro de rang pour les factions n’ayant pu trouver une place au coucher, et le nombre des hommes étant suffisant pour le service du jour, on m’a prévenu que j’étais libre et je ne me le suis pas fait dire deux fois, j’ai immédiatement repris le chemin de fer à la station de Passy pour revenir au foyer. La pluie tombe depuis ce matin, et je ne regrette pas cet incident, d’autant plus que cette garde me compte comme ayant été faite.

Toutes les manifestations en faveur de la Commune ont complètement cessé, le calme s’est rétabli et l’union la plus grande règne dans tout Paris. Je reviens sur ce chapitre, pour que vous soyez prémuni contre les bruits que l’ennemi se plait à propager en France que Paris est à feu et à sang. les portes de certains théâtres vont rouvrir, Pasdeloup a repris hier son archet, la musique longtemps exilée nous revient, cette divine harmonie est un soulagement pour nos nerfs passablement agacés.

Quant à la Bourse, il n’est guèrre question, à présent que d’une seule valeur, la valeur parisienne qui fait prime aux remparts, où l’arme au bras, nous jouons tous à la hausse.

Veuillez, Monsieur, présenter nos respects à Madame Grünberg, et agréez, je vous prie, l’expression de mes sentiments dévoués.

Louis Guillier