Nouvelles de Paris

Une collection de lettres de 1870-1871 envoyées depuis Paris au cours du siège par les Prussiens, puis de la Commune.

Personnes impliquées dans les lettres Notes techniques liées à la transcription
|

Paris 16 et 17 Mai /71

Monsieur A. Grünberg, Vienne

Je vous confirme, Monsieur, ma lettre des 13, 14 et 15 Ct.

C’est hier soir, à 6 hres moins un quart, que la Colonne Vendôme ébranlée sur sa base s’est écroulée avec fracas dans l’axe de la rue de la Paix. Mr de Bismarck en aura été l’un des premiers avisé, car l’argent de la Prusse a largement coopéré à l’anéantissement d’un monument qui rappelait nos gloires militaires et ses défaites. Que les misérables qui ont prêté leur concours à cette œuvre de destruction y prennent garde, l’heure des représailles n’est peut-être pas loin, et ce serait justice de leur abattre leur colonne de Juillet. Cet acte de vandalisme a indigné les masses, des altercations fréquentes ont lieu parmis les groupes qui se forment dans nos quartiers, il en résulte de nombreuses arrestations.

Aujourd’hui, au moment ou je trace ces lignes, nous venons d’éprouver une commotion tellement forte que j’ai desuite pensé qu’un des forts venait de sauter. Il paraît, d’après les bruits de la rue, que c’est une fabrique de cartouches qui se trouve située proche de la Manufacture des Tabacs. On parle d’un chiffre considérable de victimes. Plus nous allons, plus les émotions deviennent fréquentes, c’est à déserter Paris qui ne devient plus habitable. La Commune fait paraître des decrets qui terrifient, quand donc verrons-nous la fin de toutes nos angoises ?

Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments dévoués.

Louis Guillier

P.S. Le Dteur Tournié m’a remis aujourd’hui sa Note d’honoraires de 1869 à ce jour montant à fs 450. Il crie misère comme tout le monde.—

Inclus cette Note.—

Le canon tonne d’une manière effroyable, on s’attend à une attaque de l’enceinte pour cette nuit, je crainds que nous en ayons encore pour quelques jours et que la guerre des rues se prolonge. Il faut voir ce qui se passe pour le croire, c’est sans précédent.—